"Et t'faire écouter le son de carillons qu'fait le claquement des drisses de pavillon
contre les mâts, avec en fond le grand fracas de la mer qui rapporte, et au dessus la procession de cargo des nuages bas et blancs."
Je voulais mourir tu sais. Le matin avant même d'ouvrir les paupières, la nuit entre deux cauchemars. Je voulais mourir comme les bateaux sur le port.
Alors j'ai essayé. J'ai essayé de me supprimer la vie, de passer de l'autre côté. Peut-être que j'aurais enfin trouvé la paix.
Mais quand j'ai ouvert les yeux, le ciel était toujours gris. Le sable toujours froid. Les bateaux toujours morts. On m'avait "sauvée". C'était une deuxième mort.
[...]
"Elle est toujours là, la douleur, l'angoisse, comme une épingle glissée juste sous la peau et qu'on ne peut retirer, comme un milliard de petits bouts de verre plantés dans le coeur, des blessures qui ne cicatrisent jamais, qu'on ne saura jamais soigner. Il y a le manque, toujours cette putain de sensation à la con, celle qui t'empêche de dormir, qui te donne envie de te noyer dans la mer, cette putain de sensation à la con qui te massacre le coeur, qui te bousille tout entier, qui te prend toute ta force, toute ton énergie. Les rêves sont devenus cauchemars, les espoirs ont tourné à l'angoisse. Et après avoir hurlé jusqu'à t'en déchirer les poumons, après avoir donné tout ce que t'avais dans ces putains d'appels au secours... tu n'es plus qu'un tas de débris humains, des restes de toi complètement piétinés, des morceaux que tu devrais ramasser et réparer mais tu n'y arrives pas. Tu es vide. Plus aucun sentiment. Tu vis mais tu ne vis pas vraiment. Tu souris mais ce ne sont pas des vrais sourires. Tu marches mais tu n'avances pas. Tu pleures mais ce ne sont même plus des vraies larmes. Ton coeur bat mais c'est juste à cause de la dope que tu viens de prendre. Tu t'accroches à ce que tu peux. Sauf que tu n'as plus rien."
[...]
Peut-être que je finirai comme maman. Seule dans le noir, seule avec une bouteille de gin, seule, comme une épave laissée sur la plage.
Peut-être aussi que je retrouverai le goût à la vie, que je regarderai le soleil et que je sourirai de nouveau, que je n'aurais plus jamais envie de fermer les yeux.
Je crois que j'ai besoin d'un coup de pouce pour réparer l'épave que je suis.
fiche© vieux frères.